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Dans un contexte économique mondialisé, les rouages de la responsabilité sociale des entreprises ne sont pas les mêmes selon les contextes d’opération. En Europe, les approches nationales varient avec les différentes conceptions du rôle pivot des entreprises.
par Anne-Marie PICHETTE et Bouzid BOUHADIBA, avec la collaboration de François LABELLE
Les défis économiques, sociaux et environnementaux actuels poussent les pouvoirs publics à encourager l’adoption de comportements responsables et durables. À cet égard, les approches des gouvernements diffèrent selon le contexte social, l’histoire nationale, les défis économiques et la compréhension des rôles respectifs de l’État et des entreprises. Chacun de ces éléments devient un engrenage dans la promotion de la RSE et leur assemblage crée des mécanismes uniques, sécifiques à chaque pays.
Les rouages de la RSE
Pour mieux comprendre les rouages de la RSE, Laura Albareda, Josep Lozano et Tamyko Ysa, chercheurs à l’Institut de recherche pour l’innovation sociale de l’université Ramon Llull de Barcelone, en Espagne, ont étudié les orientations en matière de RSE des gouvernements des 15 pays les plus développés de l’Union européenne (UE).
Albareda et ses collègues ont observé quatre modèles qui reposent chacun sur une vision différente du rôle des entreprises dans la société.
L’entreprise, une partenaire active
Pour les gouvernements de plusieurs pays d’Europe du Nord, la résolution des problèmes sociaux passe par un partenariat entres tous les acteurs de la collectivité.
Cette vision découle de la culture de coopération qui prévaut. Au Danemark, en Finlande, au Pays-Bas et en Suède, la gestion par consensus et la participation à la vie collective constituent des valeurs partagées par tous les acteurs sociaux. Ceux-ci se trouvent ainsi engagés conjointement pour définir les politiques publiques en matière de RSE.
Les pays favorisant le mécanisme du partenariat social possèdent aussi une longue expérience de la gestion de l'environnement. Et les gouvernements prêchent par l’exemple. Ainsi, les appels d’offres publics sont conçus pour promouvoir des produits et services socialement responsables. Les relations entre le gouvernement et les entreprises sont considérées comme positives.
Dans un tel contexte, il va de soi que l’entreprise contribue à résoudre les problèmes de société. Les actions de RSE des organisations sont généralement volontaires, en réponse à des besoins locaux et à des attentes sociales identifiés par les entreprises elles-mêmes.
L’entreprise pivot du développement local
Pour les gouvernements de l’Irlande et de la Grande-Bretagne, les entreprises jouent un rôle fondamental dans le développement socio-économique des communautés dans lesquelles elles opèrent. De ce fait, elles possèdent aussi une responsabilité dans la lutte contre l'exclusion sociale et la pauvreté.
Dépassés par les problèmes sociaux engendrés par la crise économique, les gouvernements britannique et irlandais enrôlent donc les entreprises pour y faire face, qu’il s’agisse d’exclusion sociale, de pauvreté, de dégradation de l’environnement ou d’un manque de services sociaux. Des mesures incitatives et facilitantes soutiennent les initiatives des entreprises dans leurs communautés. Le recours à une fiscalité adaptée ou à des partenariats public-privé, à but lucratif ou non, font partie des moyens déployés.
Au Royaume-Uni et en Irlande, il est désormais courant d’utiliser des concepts tels que «investissement dans la communauté», «implication dans le milieu», « régénération des zones défavorisées » et « engagement local » pour définir la contribution des entreprises au développement social et communautaire.
L’entreprise citoyenne innovante
Les gouvernements de l'Allemagne, de l'Autriche, de la Belgique, de la France et du Luxembourg misent plutôt sur le concept de citoyenneté pour promouvoir la RSE. Cette approche s’inscrit généralement dans un effort national en matière de développement durable, effort qui favorise l’innovation et qui vise une compétitivité accrue.
Avec l’approche citoyenne, chaque composante de la société est appelée à faire sa part, les entreprises comme les autres. Les gouvernements privilégient la promotion de la RSE et la sensibilisation des entreprises à leur rôle citoyen tout en ayant parfois recours à la réglementation. Les corporations participent à la vie en société de façon constructive, en privilégiant la transparence et le respect de leurs obligations légales, certes, mais aussi en formant des alliances avec tous les acteurs de la société.
Les pays favorisant ce modèle possèdent une longue tradition de débat public sur les questions sociales. Dans ce contexte, l’encadrement réglementaire de la RSE formalise les résultats de la discussion publique.
L’entreprise, simple interlocutrice
De leur côté, la Grèce, l’Italie, le Portugal et l’Espagne cherchent à définir une mécanique qui fonctionne. Les gouvernements de ces pays se sont intéressés à la RSE seulement tout récemment. Leurs réflexions sont influencées par les directives des organisations régionales, notamment la Commission européenne.
À la recherche d’un consensus social pour définir leurs actions en matière de RSE, ces États se trouvent encore à la planche à dessin en organisant des forums de discussion autour de la RSE, réunissant entreprises et autres parties prenantes de la société civile. Les actions de RSE des entreprises dépendent aussi en grande partie de leur appartenance ou non à un groupe international qui transpose des pratiques développées dans le pays d’origine de la corporation.
Fait à noter, l’État-providence est moins développé dans ces pays méditerranéens qu’en Europe du Nord, notamment en matière de services sociaux.
Pour que ça tourne rondement
La finalité de la RSE demeure toujours la promotion d’un développement durable. Cependant, chaque contexte socio-économique présente ses défis propres. Les pratiques de RSE ont donc avantage à être calibrées par les dynamiques locales.
Il en va de même pour les politiques publiques de développement durable, accélératrices de la RSE. Comme l’indique les exemples européens, pour éviter tout grain de sable dans l’engrenage, le respect des réalités sociales et économiques locales est essentiel.
Pratiques clés | @vigiepme #ddpme |
Contexte social, situation économique et héritage culturel influencent l’efficacité des politiques de RSE. |
Pour en savoir plus
Albareda, L., Lozano, J. M. et Ysa, T. (2007) Public Policies on Corporate Social Responsibility: The Role of Governments in Europe. Journal of Business Ethics, 74, p. 391–407.
- Universitat Ramon Llull, ESADE, Institute for social innovation : www.esade.edu/research-webs/eng/socialinnovation
- Laura Albareda, Institut pour l’innovation sociale (URL) : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir.
Pour d’autres pratiques ancrées dans l’action, consultez le site de Synapse, notre partenaire de l’Université du Québec à Chicoutimi
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Le site d’échange, de participation et de collaboration sur des thèmes de développement durable : http://synapse.uqac.ca |
À propos des auteurs
Anne-Marie Pichette, MBA, coordonne les activités de vulgarisation de Vigie-PME.
Bouzid Bouhadiba est étudiant au programme de MBA de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Cette adresse e-mail est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir. |
Une initiative du Laboratoire de recherche sur le développement durable en contexte de PME – Institut de recherche sur les PME de l’UQTR
Direction : François Labelle ( Cette adresse e-mail est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir. ) – Rédaction en chef et coaching : Anne-Marie Pichette ( Cette adresse e-mail est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir. )